Wednesday, September 28, 2005

Voyeurisme public

Aujourd'hui, j'ai eu le temps de faire quelque chose que je n'ai jamais, ô grand jamais le temps de faire: je me suis assise sur l'herbe, au campus et j'ai juste regardé les gens. Je révisais en même temps (c'est de la triche?) mais je ne crois pas m'être concentrée plus de deux minutes sur le subjonctif en espagnol. Par contre, il faisait beau et le flot d'individus différents me remplissait de joie.

Alors, dans les 45 minutes de flemmardise physique et de gourmandise visuelle, je retiens:
J'AIME
1) les tresses et les pantalons hip-hop bien coupés
2) le marchand de "polos" (si, wllah al 3adim, je mens pas!) poussant sa petite charrette et littéralement assiégé par les étudiants
3) les lunettes Ray-Ban (dernière collection) et les jolis bouts de chair qu'on montre
4) les belles filles qui ont du goût, accompagnées des garçons qui vont avec (petits bisous en accessoire)

JE N'AIME PAS
1) les dreadlocks, encore et toujours. Franchement repoussants.
2) les gros sacs Louis Vuitton et le parasol qui va avec
3) les collants noirs genre années 80 sous les jupes, style grunge
4) les cheveux longs et blonds pour les garçons et le look baba-cool
5) être en retard à mon cours parce que je voulais entendre la fin de l'histoire de la fille d'en face sur la pelouse, sur sa nouvelle coupe de cheveux..

Naj', by le nounours


Hommage à un nounours

Je n'essaierai même pas de payer le taxi, tu me frapperais. Je te supplie de nous arrêter chez moul zerriaa (décidément, c'est une obsession, j'en parle tout le temps!). Tu en profites pour acheter des amandes grillées à l'amour de ta vie. On marche, tu es si grand, moi si frêle. Ma voix ne s'arrête pas, dans un flux continu, de déballer des milliers d'histoires et de questions. Tu écoutes en regardant devant toi, en me poussant lorsqu'une voiture a failli écraser l'étourdie, en jetant un oeil à ton portable de temps à autre. Et je sais que je suis invincible, car tu es là. Qu'importe si on vit dix mille choses désagréables, frustrantes pour moi, douloureuses pour toi. On sait qu'on est là, nous.
Peut-être aurions-nous dû prendre une photo annuelle, établir une sorte de rituel pour voir comment on a changé au fil des années. Ouais, je sais qu'il y aurait un changement notable: toi, fondant comme neige au soleil, moi me couvrant chaque année encore plus de boutons. Et puis une moitié de CV photo-copie, et puis des articles, des conférences, des festivaux, des mahlaba, des voyages. Mama dit: un vrai poichiche coupé en deux.
Je vais chez le coiffeur; je file chez l'amour de ta vie pour avoir un feedback. Je vole des câlins au second amour de ta vie, je demande à peine après toi: si tu n'es pas là, tu es ailleurs, toujours et encore sollicité.
16 janvier, 23h59: attends-tu à côté de ton téléphone ou te doutes-tu que je suis à ta fenêtre, tentant tant bien que mal de garder silencieuse une horde entraînée au joyeux anniversaire?
J'ai raté deux anniversaires depuis et une autre grande chose. Je rate sûrement des millions de choses tous les jours. Ca ne vaut rien, me dis-tu. "On est là", me dis-tu, en désignant ta poche de chemise Moxe. "Yak al 3iyana?". Oui. Et non. J'aurais aimé ne rien rater. C'est bête la nostalgie. Surtout aujourd'hui. Même hier. Et si je ne t'avais pas croisé dans les couloirs de 2M?
Je cesse de te chercher, tu es un vrai Capricorne: inaccessible. Mais je savoure le résultat de mon investissement émotionnel en toi, il y a maintenant presque quinze ans. J'ai toujours cru en toi. Et j'aime avoir raison.

Monday, September 26, 2005

Pour Sofia de Dallas, Souvenirs communs

Devant, le vent balaie une terre rouge et pierreuse. Un peu plus loin, des charrettes déchargent des tas de branches mortes et autres détritus biodégradables. En face, un vieil arbre. Il me rapelle les hommes vieux, ridés et pauvres, vraiment pauvres, avec seulement la peau sur les os. A ses pieds gisent des mégots par centaines.
A droite, la rue longiline, interminable. Tant et si bien qu'on n'en voit pas la fin. Une seule oasis: le petit 7anoute où les garçons achètent leurs premières cigarettes.
A gauche: Hilton, "lghaba" pour les intimes, sombre, chevelue, dangereuse, antre de tous les mythes et des faits divers: des jnoun de la forêt, à la fille qui s'est fait violer en passant par les mille et un "grissage". Je déteste les forêts. Je n'ai jamais aimé celle-là. En début d'année, on nous faisait courir là-bas pendant les cours d'éducation physique. Une véritable punition.
Derrière: le lugubre bâtiment qu'on a beau repeindre en blanc, il ne me semble que gris. Ancien couvent, il aurait été un bagne idéal pour les années de plomb. En attendant, on boutonne nos tabliers bleu ciel et beiges et on baisse la tête. Objectif: ne pas provoquer le coléreux M. Mfeddel.
Tariq Ibn Ziad est passé par là. La fuite n'est pas possible. Les quatre points cardinaux ne donnent aucun espoir. Résultat: en six ans, j'ai "séché" une seule heure, pour aller déposer mon dossier à l'école de journalisme. Si ce n'est pas de la discipline...
Les jours se suivent et se ressemblent: tristes, monotones, rangés et unisexes (le lycée est mixte, mais pas les classes du collège). On rêve d'autres cieux, de lycées cool, de liberté, de cours de chant, de gymnases avec de vrais vestiaires, avec des toilettes qui ne puent pas, des proviseurs qui savent communiquer sans gueuler et des professeurs qui ne donnent pas l'impression de venir à une séance de torture quotidienne. On regarde Beverly Hills sur 2M et on soupire. Ca tombe bien, c'est l'âge du mal-être. Une seule solution: en sortir le plus vite. Ca a expliqué l'excellent pourcentage de réussite au bac (et aux autres années). En y repensant avec du recul, je n'en garde que frustration et rancoeur. Et je ne dois pas être la seule.

Zerria bida sur les genoux en conduisant à Rabat. Nice afternoon light. Copyright Pim.

Friday, September 23, 2005

Grace

La vérité....La vérité, c'est que la vie est belle, comme un sushi gorgé de soja, comme des pieds salés dégoulinants d'eau, comme une chanson d'Alanis Morrissette écoutée en courant sur le track, et criée en silence, à l'intérieur; comme le noyau d'une pêche, qu'on suce toujours et encore en cherchant le sucré acide de ses papilles, comme l'odeur des cheveux de sa petite fille, 4 ans et 2 dents qui manquent, comme l'eau glacée de Oualidia lui chatouillant les orteils, comme sa barbe à lui, les weekends pluvieux, comme ses photos à elle du primaire avec son visage ronchon et ses chaussures noires vernies, comme la main de sa mère, blanche et douce, baisée encore et encore inlassablement, priant pour sa baraka. Elle le sait. C'est juste qu'elle oublie, parfois.

Thursday, September 22, 2005

Lolita (2)

Lolita s'ennuie. Notre belle fleur tropicale s'est installee a Casablanca, Bd Massira Al Khadra, avec son gentil mari, Reda. Le Reda en question, elle l'a rencontre dans l'avion NY-Casa, il avait galamment accepte de lui ceder le siege hublot, mais elle s'etait rendu compte que c'etait genant de deranger son voisin toutes les heures pour se precipiter au pipi-room. Mais qu'est-ce qu'il lui a pris de boire un litre d'eau dans l'aeroport en envoyant un mail collectif a ses connaissances "Je suis de retour dans 7 heures!"? Elle lui a fait son numero de Barbie emerveillee de voir l'ocean d'en haut. Elle faisait le meme numero a son papa, jusqu'a ce qu'elle commence a voyager seule. Le numero marche apparemment tres bien.
Reda remplissait les 3 criteres indispensables au debut du "plaisage", comme elle l'appelle. 1) Il avait assez de ressources pour etudier en Floride (il dinait souvent a la pizzeria ou Hatim et Ivanna travaillent). 2) sur une echelle de beaute masculine, il decrochait un 7.5. 3) lorsqu'il s'est assoupi pour une heure 9 minutes, il n'avait pas la bouche entrouverte avec filet de bave en accessoire. Pour Reda, les criteres etaient -o surprise- tres semblables.
Quelques semaines plus tard, les voila donc installes ensemble a Casa. Lolita va de la maison a la gym, de la gym a Marjane, et de Marjane a la maison, entretenue par une perle repondant au doux nom de M'barka. Au bout de quelque temps, Lolita en a marre. Son papa, au telephone depuis sa maison r'batie, lui conseille de commencer a travailler avant de perdre tout ce qu'elle a appris lors de ses 5 annees de Bachelor en Business. Lolita reflechit, reflechit (ca prend du temps tout ca), reflechit. Pendant des jours, elle est au telephone, elle sort, a des rendez-vous. Un soir, elle se met a son ordi, tapote un nouvel email collectif a toutes ses connaissances: "J'ai decide d'ouvrir un magasin de vetements. RDV dans 6 mois au Mega-Mall Rabat".
A suivre.

Wednesday, September 21, 2005

Goodbyes (2), Ayoube's version

Il s'amusait à faire des cercles de fumée, par centaines. Je lui jetai un oreiller à la figure: "tu n'es même pas un fumeur, alors arrête ton gaspillage!" "Najlae, je te suis aussi transparent qu'un biberon de bébé". Il écrasa le mégot contre sa canette de coca-light. "Non et je n'en serai jamais un. Je suis un vrai dragueur, moi". Pour la énième fois, je me préparais à écouter la description ayoubienne du bourreau des coeurs. "Regarde-moi bien, Naj', tu vois ca, c'est koulchi", lança-t-il en pointant son grain de beauté, au-dessus de la lèvre supérieure. "Ca, poursuivit-il, m'a valu mes succès éternels".
"Qu'est-ce que j'aurais voulu être un gars", me disais-je. Mais je me tus. Je ne me lasse jamais d'écouter les monologues d'Ayoube, mon alter-ego (fictif?). C'est comme si je m'écoutais, en quelque sorte:
"Je croyais que c'etait la bonne cette fois-ci, que j'avais rencontré l'amour. Je te jure Najlae, mon premier regard sur elle, c'était comme les premiers pas sur la plage apres la marée haute: il n'y a que du sable fin, vierge, beau, sans traces". Je l'ai travaillée doucement, sans pression, comme un tableau, touche par touche. Je sais qu'elle a adoré mon look de garçon clean, qui ne fume pas, ne boit pas. Les filles doivent trouver ça rassurant de ne pas avoir de vices visibles. J'ai été parfait, discret, pas étouffant. Je l'ai laissée m'appeler au debut. Par la suite, j'ai montré le Ayoube fragile, le Ayoub pas sûr de lui. Elle a adoré. Je l'ai sentie fondre comme neige au soleil. Ca n'a pas été si facile de la faire succomber mais ça n'a pas été difficile non plus. J'ai été drôle quand ses copines étaient là, je les ai laissées me tourner en bourrique. Puis j'ai fait mon sérieux, tu me connais quand je parle de politique, de religion, de presse, des centaines de films que je connais par coeur. Elle s'est attachée à moi, Najlae, pas comme toi, tu es attachée à moi. Mais là, elle est entièrement dépendante. Alors forcément, ça ne m'amuse plus. Je lui montre mon autre visage, le Ayoube tourmenté, fatigué. Je disparais pour des jours. Je n'aime pas ca mais elle comprendra forcément, non? Je n'ai jamais été capable de dire à une fille en face que je ne veux plus d'elle. Que dois-je faire?"
Ayoube se reçut une second oreiller dans la gueule.

Saturday, September 17, 2005

Goodbyes (1)

A peine eu-je fini mes mots qu'il demandait déjà l'addition. Le soleil s'était couché depuis longtemps et avait visiblement emmené avec lui le restant de patience qu'on avait l'un pour l'autre. J'avais épuisé tous mes arguments. Il ne me restait que mes yeux humides, pas très convaincants. "Comment un amour supposément aussi fort peut-il s'éteindre tout d'un coup?". S'éteindre, c'est le mot. Ce phénomène à peine perceptible et qui ronge tous les jours les sentiments.
Dans la voiture, le silence sur la poitrine. Cette fois, plus de marche-arrière. Je réalise soudainement que j'ai le plus mal pour lui. Ainsi, je souffre parce que je sais qu'il a mal, peut-être y a-t-il encore de l'espoir? Et puis non, ma décision a été prise il y a à peu près un mois. Et moi de me réjouir. A moi, la vie, la vraie, sans attaches, sans comptes à rendre, sans sentiment d'appartenance. Le Twin Center semble si loin, encore plus mal à la poitrine. Pour la première fois, on n'a rien à se dire.
A suivre...

Friday, September 16, 2005

Révérence

Robert Wise est mort. Merci pour la magie. Merci pour le rêve.

Thursday, September 15, 2005

Amine

Je me souviens de la premiere fois que je l'ai vu: en face de mon ecole, je m'appretais a traverser la rue, il faisait de meme, dans l'autre sens, l'allure cool au milieu du flot, les lunettes. Ca m'a frappee: un sosie de mon ami Dail, ici! Je le fixai, les paupieres pratiquement fermees, l'allure ridicule. Plutot pas mal, je dois l'avouer : grand, cheveux boucles noirs, sourcils noirs et...grains de beaute eparpilles sur le visage.
Et, chaque fois que je le vis sur le campus, je le fixai de la meme maniere. Le bonhomme a du avoir peur pour sa vie. Il me depassait, se retournait et je le regardais toujours aussi fixement.
Lundi,je revenais de mon dejeuner oecumenique regulier avec mes amies chretienne et juive lorsque je le vis, avec une whitie blonde. Je le fixai, en jurant a mes amies qu'il faut que je coupe net mes doutes sur l'identite de cet etudiant. Elles riaient aux eclats alors que la blonde whitie etait visiblement derangee par nos regards.
Mardi apres-midi, je suis dans la lower newsroom reflechissant a un sujet dont je parlerai ulterieurement si ca marche (je croise les doigts et les orteils) et je le vis, LUI, s'arretant au vendeur de hot dog d'en face. Je pris mon courage a quatre pattes, lachai tout ce que je faisais (mais n'oubliai pas mon portable, evidemment) et courai a Top Dog. J'attendis qu'il sorte mais il n'en fit rien. J'entrai donc, me dirigeai vers lui et lui lancai un "can I talk to you for a minute?". Le bonhomme, ebahi, le hot dog a la main : "sure". Je n'y suis pas allee par quatre chemins: "can I ask you where you're from?". Il dit: "Morocco". Je l'ai entendue au ralenti, cette "Morocco", comme une brise, comme une caresse, je l'ai entendue avec des applaudissements, avec le rugissement d'un public, avec le dandinement de pom-pom girls en vert et rouge, chacune tenant une lettre de mon pays. Soudain, je lui montrai toutes mes dents dans un seul sourire (meskine!). "Me toooo", entendit-on au milieu du food court. On vira tout de suite au francais-darija, echangeant des banalites type nom prenom, lycee, ville. Amine est a Berkeley depuis l'annee derniere comme moi et...de Rabat! Et ces imbeciles du bureau des etudiants internationaux qui m'ont dit que j'etais la seule Marocaine ici! Bref, ce soir, Amine et moi dinons avec Anas, le troisieme Marocain de Berkeley, born and raised a Meknes!

Tuesday, September 13, 2005

What's next?

Voila ce que je vais regretter à propos de cette école. Je sors d'une conférence de John Battelle, qui enseignait ici il y a encore quelque temps, avant qu'il ne commence sa trajectoire comme blogger et co-fondateur du magazine Wired. Il est venu presenter son livre: The Search, how Google and its rivals rewrote the rules of business and transformed our culture. La conférence-dialogue était simplement fascinante. J'en retiens deux ou trois choses, dont le fait que "le lecteur en sait toujours plus que nous" sur un sujet donné. Il a parlé de la manière dont il a écrit son livre, que j'ai trouvé édifiante. En effet, dès qu'il en a eu l'idée, il a écrit ce qu'il nomme une plateforme d'intentions avec ses idées, son plan, etc. Il a été assailli par ses lecteurs, dont une grande partie disait que c'était du n'importe quoi, d'autres l'encourageaient, d'autres lui inspiraient des idées, commentaient. Et c'est ainsi que son livre a, peu à peu, changé de trajectoire. Il a préféré le mode narratif au mode academique, ses chapitres ont changé. Et je me suis dit: quelle révolution ça va être si Internet va également changer la manière d'écrire un livre. Si je commence une histoire d'amour par exemple et je tiens un lectorat potentiel au courant des péripéties de mes protagonistes par exemple, mes lecteurs peuvent me proposer des manières de relier des évènements, de réécrire, de re-diriger, a l'infini. Se dirige-t-on vers un nouveau mode de faire les choses, en groupe? J'anticipe peut-être. Toujours est-il qu'en sortant de la conférence, je papote un peu avec mon magnifique doyen, Orville Schell, un véritable monument en journalisme. Schell me dit qu'il est sur le point de commencer un livre pour le compte du New-York Times et qu'il réfléchit à créer un blog en meme temps pour raconter les étapes d'écriture et avoir un input de ses lecteurs. Peut-être que, en fin de compte, je n'anticipe pas tant que ça!

Friday, September 09, 2005

Mon voisin Richard

Richard etait un drôle de bonhomme qui vivait au-dessus de chez moi l'année dernière dans cet horrible bâtiment sur l'avenue des frats et des sororities. Il est grand, blond avec des yeux bleus. Je crois me souvenir qu'il vient de l'état de l'Utah, d'une famille de mormons de plusieurs enfants. Richard est un peu gauche, un peu bizarre, voila, c'est le mot. Lubna l'appelait "the weirdoo". Il a vraiment le profil d'un malade, je suis peut-être, sûrement paranoiaque. Toujours est-il que c'est lui qui m'a aidée le jour où j'ai trouvé un serpent dans ma chambre. Il n'a pas voulu le tuer, il se dit buddhiste.
Berkeley est pleine de ce genre d'énergumènes végétariens, qui travaillent pour des compagnies d'internet, fument du shit et jouent de la musique tard la nuit (la ville parfaite?). Mais je n'appréciais pas réellement qu'il fasse son entrainement de tai-chi en face de ma chambre a 7h du matin, même si ce n'était pas de sa faute si je vivais en face du parking.
J'ai remarqué que Richard exprimait un interet rare pour un Americain pour ma personne. Ca m'a pris une semaine de le convaincre de faire un petit-dej au lieu d'un diner pour moi. Il a eu mon email en cherchant sur le site de l'école et jetait même un oeil a mon courier de temps en temps. Avant mon départ pour le Maroc en décembre, il m'a même offert un livre de Mohamed Mrabet en anglais.
Parfois, Il voyait la lumière chez moi et venait "m'inviter a prendre un thé dans la cuisine commune". Il me retenait pendant des heures en me racontant des trucs, ses aventures en Chine, son histoire avec son ex, et en fait, j'avais un gros problème: je comprenais peut-etre 25% de ce qu'il disait. Pas plus. Il parlait vite, très vite, avec des pics de volume dans la voix et des rires nerveux, presque louches. Non, souvent louches. Je l'ai évité comme j'ai pu, ai ignoré ses coups de fils, n'ai pas repondu à ses emails, l'ai bloqué sur messenger.
L'autre soir, je dinais avec K. sur Telegraph Ave. Je l'ai vu marcher dans la rue mais j'ai fait semblant de ne pas l'avoir vu.
En déménageant de chez moi en mai, j'ai voulu lui dire au revoir mais ne me souvenais pas dans quelle chambre il vivait exactement et je ne voulais pas l'appeler au telephone. Je ne lui ai donc pas dit aurevoir. Mais j'ai appris par le garçon qui a repris mon studio, que Richard avait tenu a récupérer mon lit.

Wednesday, September 07, 2005


Coucher de soleil sur Mirleft..

Insomnia, bis

5h58, cela fait deux heures que je suis debout contre la cuisinière à chatter. Je me suis réveillée vers 3h, impossible de me rendormir. Il régnait un tel silence que j'entendais mon voisin de palier ronfler! Mais était-ce le bizarroide manager Michael, à la petite moustache et au look de serial killer ou l'autre bizarroide Sandyan (je sais pas comment s'écrit son prénom), au look de buddhiste-qui-vient-de-trouver-sa-voie et aux centaines de livres et vidéos escaladant les murs? Toujours est-il que...impossible de me rendormir.
J'ai une espèce de gros poids sur le coeur. No se porque. Je pense à une histoire d'homme 30's-40's, débordant de sensibilité, s'émouvant de tout et de rien. Je balaie ces pensées d'un revers. Najlae, concentre-toi. Demain, c'est la séance de pitching. En d'autres mots, on doit défendre nos idées de documentaires devant une productrice TV. Ca va être la guerre. Al jihaaad, disait l'autre. Des idées? Des propositions?

En attendant, oasis: hier après-midi, Ocean Beach, San Francisco. Les cheveux dans le sable, pour la première fois depuis longtemps, le jean retroussé, pieds nus, lunettes sur le pif, je regarde l'océan en pensant au Maroc. Dans les cinq sens de Lady M, il manquait l'odorat. Vive l'iode marocain.

Monday, September 05, 2005

Je n'aurais pas dû...

Wahed fikoum 3inih khayba. En revenant de San Francisco, je n'ai retrouvé que la roue de mon fidèle destrier, Excitor. Je l'avais laissé tout l'après-midi au bike rack de la station d'Ashby, à trois blocks de chez moi. Je suis retournée à la maison portant la roue dans une main et le qfel dans l'autre. Tous deux gisent devant la porte, "parking" habituel de mon petit cheval vert. Et moi qui me réjouissais d'aller à la fac avec. O rage pour le banditisme d'Oakland. En plus, c'était un cado :(

Sunday, September 04, 2005

Tengo la cabessa negra

1h du mat'. Je broie du noir. Je chercherai sur e-bay un nouveau cerveau, le mien commence à pourrir sur les côtés.
"Don't panic", sings Coldplay. Ce yaourt St Benoît ($2 quand-même!) m'a donné la nausée. Je crois que ce sont d'autres choses qui me donnent la nausée mais j'ai l'art de trouver des prétextes.
Il y a une heure, j'ai dévalé les collines de North Berkeley sur mon fidèle destrier vert, Excitor, pour la première fois depuis des mois. Merci à M. et à J. qui m'ont aidée à gonfler les roues ce soir. Le vent siffle dans mes oreilles, le froid pénètre mes os et les boucles d'oreilles achetées rue des Consuls volent avec mes boucles de cheveux. Sensations d'il y a 15 ans dans une fameuse petite rue du Souissi. Mes doigts sont gelés. Mais oui, c'est le vent dans les yeux qui me fait pleurer, c'est la poussière. Je sais qu'au même moment, on me trompe.

Friday, September 02, 2005


Bee Bee by Vampirus

Missing tilt

On m'avait parlée de Mehdi (le prénom est-il assez commun? Oui? merci) assez souvent. On me l'avait décrit comme LE mec parfait. Ma soeur aînée le connaissait de par son beau-frère, enfin, vous connaissez ces histoires là. "Attention, soeurette, m'avait-elle dit, celui-là doit rester dans la famille, hein?". Je les rejoignis un jeudi soir au Hamilton bar avec mon scepticisme habituel. Enfin, vous me connaissez, peu de mecs m'intéressent, me captivent, m'intriguent, me plaisent.
Comme j'ai eu tort de me ramener en flip flops California girl, look hippie-qui-sort-de-chez-elle-acheter-un-litre-de-lait-de-lepicerie. Alors d'abord, la chemise. Le bonhomme était flanqué d'une sorte de magnifique qamija rose, pantalon cintré, chaussures impeccablement cirées, lunettes stylées, sourire personnalisé. "J'adore le Maroc", me suis-je dit, flanquée à mon tour de mon sourire le plus débile, en faisant la bise. Un point de plus: le parfum. Allah Allah.
Je me posais, attendant la suite. La suite était à la hauteur: MBA aux USA, Fulbright comme moi, stage à la Banque Mondiale à DC, prolongé par une offre d'emploi. Il s'occupe des prêts accordés aux pays pauvres. Lorsqu'il n'est pas à Washington, il parcourt l'Afrique, l'Amérique Latine. Ya salam. Il parle Espagnol (LE "détail" qui tue). Il est charmant comme tout, est bien éduqué, est drôle. Qu'est ce qui cloche alors, vous dites? Ben rien. Rien ne cloche. On s'entend super bien, on s'emaile souvent. Ma soeur me harcèle pour savoir pour quand elle doit préparer de nouveaux caftans. Elle ne comprend pas que même "parfait" comme il est, quelque chose manque. Vous savez, vous, petits malins, le truc qui vous prend à l'estomac, qui vous vide les jambes, les sourires bébêtes en regardant "Les Zamours" sur France2, les coups de fil à deux digits avec plein de questions super intéressantes sur "le temps qu'il fait là-bas", etc. Eh ben, tout ça, y a pas avec Mehdi. Et bien sûr, on peut pas se forcer. Ca vient au moment le plus inattendu. Parfois, ça ne vient pas. C'est le cas. Doumaaaaaage.

Message privé

Honnêtement, je ne me rapelle plus des deux derniers jours qui ont précédé mon retour aux USA. Je me souviens seulement de la grande confusion, dans mon petit cerveau et des mille et une choses que j'avais à faire. Je sais aussi que j'avais prévu d'aller à Casa dire au revoir à deux personnes, mais que l'après-midi est vite passé et que, dans l'état où j'étais, les adieux allaient être particulièrement humides. Bref, ça m'arrangeait un peu de m'enfoncer dans la réflexion de combien de chebbakia et quelles paires de chaussures je vais laisser au Maroc pour ne pas me faire taxer au check-in pour overweight (j'ai de l'expérience dans ce domaine! On ne m'y reprendra plus). Le bouclage des valises s'est fait vers 2h du matin, maintenant que j'y pense.
Pour résumer: pardon aux deux personnes qui sont à Casa et qui comptent pour moi. Et, oui, "the lack of goodbye is not more painful than the pain itself".

Télérama story, 2002

Il m'avait envoyé le plus bel e-mail du monde. Et je me suis dit que je devais être stupide de perdre tout cet amour dans cette ville glauque et puante. Je lui dis : « prépare-toi. Je te kidnappe. Veux-tu me suivre à Pépèretrankillos, mon petit coin de paradis ? ». Non seulement il était assez fou pour m'aimer, mais en plus, il laissa tout tomber pour venir avec moi. J'avais découvert ce petit coin de paradis lors d'un voyage. Je m'étais jurée d'y retourner. Avec lui, tout me semblait encore plus beau. Même la grande ville glauque me paraissait belle, alors...La petite cabane dénichée par P'tit Louie nous convenait à merveille. Lui passait ses journées à écrire. Moi, à l'aimer encore plus, et mieux. Il écrivait son passé. Il le reconstituait peu à peu. Après toutes les épreuves qu'il avait vécues, il avait enfin le droit de vivre. A 34 ans, il était temps. Et plus il se sentait bien, plus il sentait ce besoin de tout ressortir. Tout ressortir autrement que dans une douzaine de bières écumées dans un bar minable. Et on n'avait même plus besoin de parler. Il me souriait comme ce jour où je l'avais embrassé dans un car, sans le connaître, juste parce que son odeur naturelle mêlée à celle de ses cigarettes me faisait un effet monstrueux. On m'a engagée dans une petite école à deux pâtés de cocotiers. Enseigner le Français à des petits bouts de choux qui venaient pieds nus et me rapportaient des fruits. Et je me sentais utile. Et je souriais rien qu'en les faisant répéter : « maison » ou « banane ». Rien ne me manquait. Ni ma voiture, ni mon chez-moi, ni ma famille, ni mon petit confort, ni mon travail que j'ai mis si longtemps à avoir. Et lui attendait juste que P'tit Louie lui ramène ce que sa soeur lui « fedexait » tous les mois, ses cigarettes préférées, entre autres. C'était loin derrière, ces petites batailles mesquines qui me consumaient, et le consumaient, et nous consumaient. Et nous étions nés à nouveau. Je lui avait menti. Je n'en avais rien à faire de ce petit coin de paradis. Mon pépèretrankillos, c'était lui.